Ballon bleu - Résidence de recherche de Myriame Larose

JOURNAL DE BORD

Myriame Larose est interprète au sein de différentes compagnies de théâtre, de danse et de marionnettes et elle enseigne au DESS en Théâtre de marionnettes contemporain de l’UQÀM. Également médiatrice pour les tout-petits (Casteliers et Petits Bonheurs), elle était en résidence au Cube pour fouiller l’œuvre de Françoise Sullivan en vue de la création d’une expérience interactive destinée aux 0-2 ans. (En résidence au Cube du 29 janvier au 13 février 2024)

Jour 1,
29 février 2024

Café croissant.

On rencontre l’équipe du CUBE et du Carrousel.

On raconte qui on est (Elisabeth Bosquet et moi) et d’où on provient.

On raconte le projet.

C’est bon de se sentir bienvenues, de voir que le projet intéresse d’autres personnes que nous, de voir quelles questions il suscite.

En fin d’am et pm, on se met à jour ! On ouvre les matériaux reçus et on élimine avec certitude certains éléments.

On commence à imaginer des dispositifs scéniques où tous les matériaux seraient contenus dans un seul « objet ».

On teste la « chaussette bleue » et les rubans rythmiques.

Pour ce premier jour de résidence, je souhaitais rentrer tôt pour poursuivre ma recherche à la maison (avec un souper au four pour le retour des enfants). J’ai mis un repas au four certes, mais j’ai aussi répondu à de nombreux courriels relatifs à différents projets et… je n’ai pas du tout investi ma recherche. Le constat : pour me déposer dans la création, pour laisser les idées émerger, pour plonger, j’ai besoin de ces espaceS réservés, préservés. Et je le savais, c’est ce que j’avais écrit noir sur blanc pour le dépôt de ma candidature : « Un espace mental où me déposer, un espace physique pour inviter des personnes à bouger, un espace atelier pour bricoler des prototypes et laisser les choses en plan le soir pour les voir sous un autre angle le lendemain, un espace-temps dédié qui me permettra d’avancer (enfin) et de passer de l’idée au réel. » Demain, et pour la suite, je me dédie entièrement. Les paniers de linge à plier, les courriels « autres », les projets à démarrer dans trois semaines attendront.

Jour 2,
30 janvier 2024

La désillusion

Les matériaux ne permettent pas à eux seuls de « faire voir », faute de financement*, on doit créer à moindres coûts… des anneaux de grande taille avec des matériaux résilients. C’est la désillusion… On avance néanmoins. Moi sur le « tableau d’idées », Elisabeth sur la sculpture par assemblage de « disques pop-up ». Ça, ça fonctionne !

* Et là, on remercie le CUBE d’offrir une bourse avec la résidence qui me permet d’offrir des sous à mon équipe et d’acheter quand même certains matériaux « ready made ».

Nous traçons les bandes au sol pour délimiter l’espace bi frontal dans lequel nous souhaitons explorer avec la matière et définissons les proportions.

Bande : 3 m de largeur

Disque : 2 m de diamètre ? 1,5 m de diamètre ?

Jour 3,
31 janvier 2024

Le MIRACLE !!!

En arrivant au Carrousel, je veux bien y croire, mais je suis encore « parasitée » par ce manque de ressources financières et l’idée de « faire voir » ce projet en image à des subventionneurs pour les autres phases de recherche. Nicolas Fortin, le DT du Carrousel est sur place.

N – Comment ça se passe ?

M – Ben je travaille à accepter le rythme.

N – Faut que t’ailles plus vite ? Plus lentement ?

M – Bah non… Faut que j’accepte « qu’avec pas de cash » on cherche avec ce qu’on a.

N – T’as besoin de quelque chose en particulier ?

ET BAM ! MAGIE !

En cinq minutes, avec ce qu’il avait sous la main, on a retrouvé l’espoir !

  • Un anneau de 1,5 m de diamètre
  • Des feuilles de carton gigantesques pour bricoler un prototype de disque.

On a aussi soufflé le ballon de 1 m lumineux… pas très impressionnant, mais qu’on pourrait l’emballer dans un tissu coloré. Éventuellement.

C’est la joie ! On assemble, on colle.

On explore avec le disque et on voit LE VENT apparaître dans notre lexique :

Le mouvement de l’air vis-à-vis les enfants !

On teste l’anneau. On se dit que c’est bruyant… ça nous prendrait du Marley…

ET BAM ! MAGIE !

Les chutes du tapis de danse de Scoooootch ! Amélie Poirier des Nouveaux Ballets du Nord–Pas-de-Calais nous offre ce morceau pour que nous puissions aller de l’avant !

On ajoute de l’éclairage aussi.

ÇA AVANCE !!!

Jour 4,
1er février 2024

Seule, la préparation.

Je suis seule devant la matière et l’espace. Je fouille encore davantage l’œuvre et la vie de Françoise Sullivan. Je découvre « Je parle », une performance dansée qui me captive et ouvre des portes par rapport à notre univers. J’ajoute des images de ses œuvres pour qu’on s’inspire du mouvement dans les toiles, des compositions picturales et sculpturales, des titres même. J’imagine des séquences, des liants, des jeux.

J’installe de tapis de danse (côté blanc/surface de la toile) et c’est un univers qui se déploie.

Lundi, Noë Cropsal puis Dinaïg Stall et Michel F. Côté se joindront à nous. Je mets tout sur papier avant de voir les corps dans l’espace. Je suis enthousiaste et tellllllement reconnaissante.

En quittant le local, j’ai un flash… Et si l’espace était composé ainsi : Avec tous mes talents de dessinatrice, je griffonne sur une vieille facture de changement d’huile et j’envoie le tout à Elisabeth.

Jour 5,
2 février 2024

Constructive journée.

Tout se dessine. On poursuit Elisabeth et moi la fabrication et les explorations en vue de lundi.

Ça nous satisfait ces prototypes.

Ça donne à voir les idées.

En fin d’am j’ai une rencontre avec Marie-Luce du Cube pour faire un retour sur ma demande de subvention refusée au CALQ. Un baume. Je comprends mieux. Elle me donne des outils aussi. Tout à fait à ma portée pour mieux faire comprendre ce projet.

Je demande à Nicolas « Et si… »

Et BAM ! MAGIE ! Deux portants et on est à même d’imaginer un dispositif scénique (inspiré du Rideau sonore de Françoise Sullivan) où nos matières peuvent être installées.

Jour 6,
5 février 2024

L’équipe !

C’est là que ça se passe ! Noë Cropsal débarque en am pour explorer avec Elisabeth Bosquet en am. Ça explose. Ça donne lieu à toutes sortes de nouvelles images et des qualités de mouvements différentes.

La matière entre en relation, une dramaturgie par combinatoire pourra émerger de tout ça !

En après-midi nous présentons de manière très libre une variété de combinaisons à Dinaïg Stall (conseillère à la dramaturgie) et Michel F. Côté (concepteur sonore). Leurs réactions, leurs questionnements et leurs idées propulsent à nouveau la recherche à une autre étape.

Après cinq ans de latence, Ballon bleu prend forme et chacun. e y est pour beaucoup.

Jour 7,
6 février 2024

Myriame et Elisa font des films !

On capte des mouvements, des images, des fragments pour documenter et « faire voir » : 1. du point de vue de l’enfant 2. Les références à Françoise Sullivan 3. Les qualités de mouvements recherchés. L’idée du « avec pas de cash » nous rattrape… donner à voir des prototypes, des couleurs qui ne sont pas les bonnes, des matériaux et des textures issu. e. s du « ready made », un dispositif d’éclairage minimal. On continue, on essaie, on tente de mettre en lumière ce qui fonctionne pour nous. Et au final (en regardant tout ça le lendemain : c’est pas siiiii mal !)

Jour 8,
7 février 2024

Les sub.

Je poursuis le travail d’images et de vidéos en am et je plonge dans la subvention du CAC. J’essaie d’éclaircir les notions de multidisciplinarité, pluridisciplinarité, transdisciplinarité pour chacun de ces organismes. Il y a bel et bien des lexiques sur les différents paliers de subventionneurs, mais rien de formellement époustouflant.

Martin du Cube me fait parvenir cet article fort éclairant :

https://perezartsplastiques.com/2018/03/05/pluridisciplinarite-interdisciplinarite-transdisciplinarite/

Ballon bleu est ? Indiscipliné* ? Assurément Pluri ou Trans ?

*Merci Dinaïg pour le fou rire !

Jour 9,
8 février 2024

Encore et toujours les sub.

Je rencontre à nouveau Marie-Luce pour discuter du financement (toujours aussi pertinente !). L’angle, le ton, ce qui doit être présenté s’affine tout comme le projet. Les étapes de recherche à venir sont mieux définies à la lumière des explorations actuelles.

Jour 10,
12 février 2024

RencontreS.

Aujourd’hui, Marie-Christine Lesage vient me rencontrer (Bougie d’allumage offerte par Le Cube). Son écoute, sa disponibilité, son enthousiasme face au projet : je suis émue. Je parle, je parle, je parle puis les rôles s’inversent. Elle saisit TOUT.

Matrimoine

Œuvre de Sullivan à la source des choix comme matériaux.

Couleurs Tout est en relation Formes

Émergences à partir des partitions Dramaturgie singulière au cœur du projet

Entrelacement des langages visuels et sonores

Combinatoires

Poétique : ça s’adresse à un autre lieu de l’être.

 

JE SUIS REMPLIE.

Touchée par tant de générosité, par cet échange dense et fluide en même temps.

Jour 10,
12 février 2024

RencontreS, la suite !

Ce pm, c’est Marilyne St-Sauveur (amie de loooooongue date, artiste incroyable) qui se joint à Elisabeth et moi ! Elles ne se connaissent pas et plongent ensemble à la minute où on démarre. Encore une fois, ça explose. L’univers se déploie, les corps, matières prennent le relais de la matière et/ou l’assiste, la guide.

Jour 11,
13 février 2024

WOAAAAAHHHH !!!!!!!

Journée de plaisirS explosifs ! Elisabeth Bosquet, Michel F. Côté et Marilyne St-Sauveur réunis pour animer de la matière, être matières et jouer. Ça donne de bien belles affaires. Et quand en plus, en seconde « party » de journée Gabriel Dharmoo vient nous rencontrer (seconde Bougie d’allumage offerte par le Cube), ça parachève bien une première étape de recherche et création.

10 jours après la fin

Les espaceS dédiés.

Le jour suivant la fin de la résidence, la vie m’a avalée.

Tout ce qui a été mis en suspend pendant la résidence toque à ma porte.

J’aurais maintenant besoin d’un mois « vide » pour décanter, visionner, choisir, monter, écrire.

J’ai bien envoyé un merci « vite, vite » en attendant de pouvoir m’y replonger et mettre des mots.

J’ai bien fait mes virements.

Mais,

Ce temps dédié.

Ces espaceS.

Ces aller-retourS.

Cette interminable attente et cette fulgurance.

Cette chance.

Merci Françoise Sullivan pour l’inspiration, la matière, le matrimoine.

Merci Le Cube et Le Carrousel de nous avoir offert ces espaceS, ces ressourceS, ce temps dédié.

Merci Elisabeth. Merci Noë. Merci Marilyne. Merci Michel. Merci Dinaïg. Merci d’avoir permis aux idées de se frayer un chemin après tout ce temps, d’avoir « donné à voir » aussi généreusement.

Merci Martin Boisclair. Merci Marie-Luce Gervais. Merci Mélanie Dumont. Pour la bienveillance, l’accompagnement et l’espoir.

Merci Marie-Christine Lesage. Merci Gabriel Dharmoo. Vos lumières.

Merci Nicolas Fortin. Merci Amélie Poirier. Bam ! Magie !

Merci Marie-Ève Huot. Pour tes passages intéressés, ta bienveillance dans tout.

Merci Hubert Jégat. Merci Frédéric Jeanrie. Pour le « guts », ça le prenait.

Merci Sophie Labelle. Merci Sabrina Baran. Pour la suite, pour « guts » aussi parce qu’à la base, ça n’était qu’une idée.